Pascal Obispo: «Cela ne me dérange pas de ne pas être formaté»

INTERVIEW Pascal Obispo évoque pour « 20 Minutes » l’œuvre de Marceline Desbordes-Valmore qui lui a inspiré son nouvel album, « Billet de femme », qui sort ce vendredi…

Propos recueillis par Fabien Randanne
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Pascal Obispo.
Pascal Obispo. — Dominique Gau

« J’ai rencontré une femme, avec ses mots, sa douceur, ses émotions, ses souffrances et sa douleur intense. Voici le résultat de cette rencontre en 12 chansons comme 12 déclarations d’amour. » C’est ainsi que Pascal Obispo présente Billet de femme (Sony Music – Jive Epic), son nouvel album disponible dès ce vendredi. Celle qui a tant bouleversé le chanteur est Marceline Desbordes-Valmore, une poétesse du XIXe siècle. Sa vie, jalonnée de drames, lui a valu le surnom de « Notre-Dame-des-Pleurs ». « Il n’y a rien que je trouve ancien dans son écriture », confie Pascal Obispo, au sujet de l’auteure dont il fait revivre le verbe en musique. Entretien avec un artiste qui va « là où [son] cœur le mène ».



« Billet de femme », c’est un album concept…

[Il coupe] Non, ce n’est pas un album concept, mais un album de chansons. Quand je fais des albums en entier avec [le parolier] Lionel Florence, ce n’est pas un concept. Là, j’ai simplement « rencontré » un auteur différent de d’habitude.

Comment avez-vous « rencontré » Marceline Desbordes-Valmore ?

J’ai trouvé des livres et des cahiers d’écoliers dans les affaires récupérées dans la maison de mon père après son décès [en 2012]. J’avais du mal à me plonger dedans et quand je les ai finalement ouverts, je suis tombé sur des choses qui m’ont touché, inspiré. Il y a un côté ésotérique. J’ai ouvert un livre dont les pages étaient cornées et j’ai découvert une poésie, une poétesse. Je me suis rué sur le piano pour composer les chansons. Il y a tant de grâce, de délicatesse, de pureté dans les poèmes de Marceline Desbordes-Valmore. Elle parle d’amour avec une telle modernité. J’ai acheté tout ce qu’elle a écrit. L’album s’est fait en peu de temps, c’était comme une fulgurance.

C’était une telle évidence ?

Oui, tout est venu très vite. Il y avait une sorte de correspondance, comme si j’étais habité pendant tout un week-end. C’était un week-end d’écriture avec Marceline. C’est comme si j’avais reçu un texte d’Etienne Roda – Gil ou de Lionel Florence : ça me correspondait. Il n’y a rien que je trouve ancien dans son écriture. La souffrance exprimée, sa façon de parler d’amour, de ses attentes… est sublime. C’est passionnant, doux, tendre.

Comment avez-vous adapté ces poèmes en chansons ?

Je n’ai pas coupé dans les poèmes. C’est elle qui écrit et moi qui chante. J’ai fait toutes les mélodies. Comme je travaillais sur l’œuvre d’une poétesse, j’ai eu besoin d’être épaulé par un maître de musique, en l’occurrence Jean-Claude Petit [le compositeur et arrangeur a notamment signé les musiques des films Jean de Florette, Manon des Sources et Cyrano de Bergerac]. On a seulement mis une semaine pour enregistrer l’album.

Ne redoutez-vous pas de déconcerter votre public ?

J’espère qu’il sera déconcerté par la possibilité d’entendre ces beaux verbes et tous ces accents circonflexes qu’il ne faut pas qu’on enlève. Mais cette poésie est tellement moderne que ça ne fait aucun doute. Je dirais que je fais d’abord un disque pour moi, selon ce que je crois être bien. Je n’ai pas forcément d’appréhension. Jean-Claude Petit m’a dit qu’il trouvait ça bien, ça me contente.

Pensez-vous que les radios et les émissions de variété à la télévision seront, elles aussi, convaincues ?

Je ne sais pas, je le souhaite. J’ai déjà fait beaucoup de musique dans ma vie. Je fais des albums depuis vingt-cinq ans et, avant, j’ai passé dix ans dans un groupe de rock. Je vais là où le cœur me mène. Je ne réfléchis pas en termes industriels, de singles… Pour moi, c’est un moment, une émotion. Cela ne me dérange pas de ne pas être formaté. Quand on est un jeune artiste, ce qui est difficile, c’est que l’on cherche à vous mettre dans des cases. Alors c’est bien, quand, plus tard, la case que vous occupez est juste la vôtre. Je préfère être hors format, avec mes qualités et mes défauts.



Ce printemps, vous lancerez votre tournée, en commençant par le Zénith de Nantes, le 20 mai…

Je me sens inutile si je ne pars pas en tournée. Il faut que je propose quelque chose aux gens. Je veux qu’ils passent un bon moment. On va créer un peu de rêve avec un orchestre symphonique, comme celui qui m’a entouré pour Billet de femme. Mes anciennes chansons seront réorchestrées pour l’occasion.