Entre Modernité et intemporalité

Charlotte Pudlowski
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A 27 ans, l'Américain Tao Lin est déjà l'auteur de deux romans.
A 27 ans, l'Américain Tao Lin est déjà l'auteur de deux romans. — V. WILL / AP / SIPA

   Un étrange roman que ce Richard Yates de Tao Lin. D'abord, il n'a rien à voir avec l'écrivain Richard Yates (1926-1992), simplement mentionné six fois. Ensuite, les deux personnages principaux s'appellent Haley Joel Osment (comme l'acteur du Sixième Sens) et Dakota Fanning (autre jeune actrice), mais ce sont simplement deux jeunes paummés, qui chapardent, qui essaient une histoire d'amour, et qui s'ennuient beaucoup. 

 Internet et la condition humaine
On serait vite tenté de dire que ce roman est un pur produit du XXIe siècle. Qu'avec cette écriture froide, il raconte la vie de jeunes gens qui s'aiment à l'heure de Google. Mais on aurait tort. Certes, Tao Lin est un jeune écrivain (27 ans) doté d'un blog, d'un compte Twitter (« je passe parfois des heures à écrire un tweet », explique-t-il à 20 Minutes), d'un Tumblr. Il poste des vidéos de lui avec ses copains ou avec sa femme (il s'est marié sur un coup de tête à Las Vegas et a mis la vidéo en ligne). Certes, les héros de Richard Yates (Diable Vauvert) se rencontrent sur Internet, passent beaucoup de temps en ligne, lisent leurs mails sans cesse, se parlent par chat et par SMS. Mais leur difficulté à se comprendre, à vivre, leur souffrance et leur ennui n'a rien à voir avec le Web. « Chaque fois que j'écris “SMS” ou “mail”, on pourrait remplacer par “lettre” », précise Tao Lin. « Oui, les personnages vivent dans notre monde d'aujourd'hui. Mais ils font partie d'un petit pourcentage de gens qui se sentent seuls et souffrent, que la littérature a toujours montrés ». Ce sont des exclus intemporels. « La vie, la mortalité, l'impossible ubiquité : les changements que produit Internet ne sont que superficiels, rappelle l'auteur. Les choses immuables, c'est ce sur quoi je travaille dans ma fiction. La condition humaine ne change pas avec Internet. »