Concerts: Lille, the place to swing

MUSIQUE Pour «20 Minutes», des artistes ont choisi le meilleur public de France...

Benjamin Chapon et Gilles Durand
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Qu'est-ce qu'un bon public ? Un public qui sait arrêter d'applaudir quand la nécessité s'en fait sentir.
Qu'est-ce qu'un bon public ? Un public qui sait arrêter d'applaudir quand la nécessité s'en fait sentir. — P. LEROUX / SIPA

Les artistes n'ont pas perdu la boussole. Pour la première édition du concours 20 Minutes du meilleur public de France, une majorité d'artistes, tous styles confondus et ayant beaucoup tourné en 2011, ont élu Lille. Outre la victoire nordiste, que faut-il retenir ?

La valeur « plaisir »
Alors, c'est quoi un « bon public » ? Un public qui gueule ou qui la boucle, qui pogotte ou qui écoute, foule touffue ou groupe intime ? L'adjectif primordial qui revient souvent dans la bouche des artistes est « chaleureux. » Florent Marchet a voté Rennes pour des raisons plus précises : « Parce que le public est beau, bien habillé, drôle, émouvant et tactile. » Quant au groupe Seuls à trois, formé de Renan Luce, Benoît Dorémus et Alexis HK, il goûte « le plaisir du partage. » Cocoon ne dit pas autre chose : « Quand un public prend du plaisir, nous aussi. C'est tout simple. »

Paris est (quand même) magique
Surprise de ce classement, Paris arrive deuxième à un cheveu de Lille. Le public parisien a pourtant une sale réputation de peine-à-jouir. « J'avais une grosse appréhension de jouer à Paris, raconte Charlotte Gainsbourg. Du coup, la joie et le soulagement que ça se soit bien passé ont décuplé mon plaisir. » Le groupe Aaron avance un autre facteur : « Les salles mythiques comme autant de lieux magiques. » Cette prime à la grosse salle euphorisante a sans doute servi également Lyon (5) et Marseille (6).

Petites salles, grosses ambiances
A l'inverse, certaines « petites » villes sont fort bien classées. Clermont-Ferrand complète ainsi le podium sans doute grâce à l'excellente Coopérative de Mai. Plusieurs artistes vantent ces salles flambant neuves où le son est bon, l'accueil très pro et le public bien éduqué par une programmation à l'année qui tient la route. Outre Clermont, Rouen (7), grâce au tout nouveau 106, a séduit plusieurs groupes.

Locomotives locales
Reims (8), Tours (10) et Caen (14) doivent leur place à des artistes venus de chez eux. Dans ses groupes locaux, certains qui disposent d'une audience nationale booste les publics. Rennes (4), vanté par Lilly Wood and The Prick comme un public « toujours présent et chaleureux », a ainsi longtemps pu compter sur des groupes rock locaux qui créaient une dynamique positive autour des concerts.

> Classement / Ils ont voté

1 – Lille 2 – Paris3 – Clermont-Ferrand4 – Rennes5 –  Lyon6 – Marseille7 – Rouen8 – Reims9 – Toulouse10 – Tours11 à 17 –  Bordeaux, Montpellier, Dijon, Caen, Nancy, Nantes, Strasbourg…Aaron, Ben  l'Oncle Soul, Birdy Nam Nam, Boogers, Brigitte, Cascadeur, Charlotte  Gainsbourg, Cocoon, Concrete Knives, Debout sur le Zinc, Florent  Marchet, Grand Corps Malade, Nasser, Imany, Lilly Wood and The Prick,  Mademoiselle K, Orel San, Rodeo Massacre, Soprano, Seuls à trois, The  Do, The Shoes, Thomas Dutronc, Twin Twin… Merci à eux et à tous les  artistes croisés au fil d'interviews qui nous ont parlé de vous, leurs  publics préférés.

Alex Mélis, secrétaire général de l'Aéronef, à Lille.

Lille meilleur public de France, qu'en pensez-vous ?
C'est  réjouissant, car on espère avoir joué un rôle. Les équipes qui passent  chez nous nous disent parfois que l'Aéronef est leur meilleure date,  mais je ne me rends pas bien compte, car je m'assimile à ce public. La  vie culturelle lilloise est devenue dense depuis l'événement Lille  2004. Le public évolue dans cette richesse culturelle et s'est habitué,  plus qu'ailleurs, à aller au concert. Le Nord a longtemps nourri un  complexe par rapport à ce qui se passait en Belgique, beaucoup plus  dynamique. Nous n'avons plus à pâlir devant la comparaison.

Comment ça s'explique ?
Il  y a une tradition de convivialité dans le Nord. Ça s'explique peut-être  par le climat, car on se retrouve plus facilement à l'intérieur, et une  histoire ouvrière. Les équipements de service public, comme le nôtre,  font tous de l'action culturelle qui dépasse le simple phénomène de  consommation.

Le phénomène est-il différent ailleurs ?

Je ne peux comparer qu'avec Grenoble où j'ai travaillé. Il y a à Lille un sentiment de fraternité important  entre les différents organisateurs de concerts. Nous ne sommes pas dans  un monde où tout le monde s'aime, mais le climat professionnel n'est pas  mauvais. Il nous arrive régulièrement de travailler ensemble, ce qui  n'était pas le cas à Grenoble. J'ai l'impression que le public le  ressent.