PNL, Booba, Gradur… Pourquoi les rappeurs font des showcases en clubs plutôt qu’un Olympia
RAP Les artistes hip-hop à succès se produisent régulièrement dans les discothèques d'Île-de-France ...
Avant de devenir le premier groupe de rappeurs français programmés au fameux festival californien Coachella, PNL a joué… au Pharaon, à Meulan, dans les Yvelines. Les rappeurs les plus en vue du moment se produisent d’ailleurs régulièrement en show cases dans des discothèques d’Ile-de-France tout comme Booba, Gradur, Kaaris, Dosseh… Bref, comme tous les rappeurs.
Si le phénomène n’est pas nouveau, il s’est amplifié à la demande des clubs. « Le modèle du DJ résident ou invité ne fonctionne plus très bien, il faut autre chose pour attirer les gens, explique Ludovic Walpole, directeur de la communication del’Imperio Club, à Pierrelaye (Val d’Oise). On cherche les effets de bords. Annoncer 50 Cent à l’Imperio, ça veut dire que les gens vont aussi venir avant et venir après. Même si le soir du show case, avec le cachet et les frais de sécu, le chiffre d’affaires est niqué, ça fait connaître le club, ça nous donne une bonne image. Nous, on met le paquet niveau pub quand on a une star en show case. »
Au Pharaon, aussi, le public est devenu exigeant. « Ils veulent des artistes, pas des DJ, explique Ramsès. Cela peut être Patrick Sébastien ou un chanteur de variété française mais c’est avec les artistes Street que ça marche le mieux. »
Vrai ou faux concert ?
Du côté des artistes, le relatif inconfort d’un show case, moins prestigieux qu’un concert, est compensé par la joie de rencontrer son public (bien sûr) et un cachet plutôt facile, entre 10.000 et 70.000 la soirée. « Comme tous les clubs font fait la même chose, les artistes ont monté leurs cachets, c’est la loi de l’offre et de la demande, explique Ramsès, lucide. Quand Jul vient chez nous au Pharaon, tu peux être sûr qu’il va faire tous les clubs d’Ile-de-France ensuite. »
Souvent moins long et moins lourd qu’un concert, un show case est plutôt léger à monter. « Ils jouent une demi-heure, en play-back avec des retours », raconte Ramsès. Mais à l’Imperio, Ludovic Walpole nous jure que les artistes ne jouent pas en play-back : « Chez nous ce sont de vrais concerts, qui peuvent durer une heure. Si l’artiste a un répertoire de tubes, il voudra faire plaisir au public, et restera longtemps sur scène. »
Bonne ambiance et sécurité
« Les gens sont contents de les voir en vrai, explique Ramsès. Et puis chez nous, c’est premier arrivé, premier entré, pas besoin d’acheter sa place à l’avance. » A l’Imperio, on prétend même que « ça vaut largement un concert. C’est même mieux : il y a une meilleure ambiance et une proximité avec l’artiste. Et puis les gens peuvent repartir avec une photo prise avec l’artiste. Et surtout, c’est moins cher. »
L’un des gros inconvénients de ces événements sont les surcoûts en sécurité. « On connaît notre métier, rassure Ramsès. Les soirs de show cases, on embauche des extraspour gérer la sécu. Quand on a une grosse tête d’affiche au Pharaon, il y a beaucoup de monde qui ne peut pas rentrer. » A l’Imperio, on organise parfois des préventes de billets mais on ne lésine pas sur la sécurité non plus : « On a affaire à des gens alcoolisés, il faut faire attention à ça aussi. »
Le choix dans l’horaire
D’ailleurs, l’un des objectifs avoués du bout des lèvres de ces show cases est bien sûr de vendre des bouteilles d’alcool au prix fort à un public qui attend la star. « L’artiste peut jouer à une heure ou quatre heures du matin, ça dépend, il y a un accord préalable avec l’artiste », explique Ramsès. Ludovic Walpole lui tient à ce que les artistes jouent « tôt », vers une heure du matin : « On évite de les faire monter sur scène trop tard parce qu’il y a des gens qui ne viennent que pour ça. Il y a aussi le risque que la rumeur court que l’artiste ne va pas venir. A une époque, les artistes avaient tendance à annuler leurs show cases au moindre problème alors qu’ils n’annuleraient jamais un concert. Maintenant on leur demande de faire une vidéo sur leur téléphone pour les réseaux sociaux dans laquelle ils annoncent leur show case chez nous. Sans ça, les gens n’y croient pas. »
Dans une autre boîte francilienne, un responsable de la programmation nous explique, en préférant rester anonyme, que « les contrats pour les show cases, c’est l’enfer. Il faut absolument tout détailler. L’horaire de passage : plus c’est tard, plus c’est cher. Le nombre de bouteilles offertes, le nombre d’invitations pour les proches de l’artiste… Souvent il y a des demandes spéciales : il faut louer une limousine pour amener l’artiste et ses potes depuis Paris, il faut réserver une suite dans un grand hôtel, il faut que le personnel du club porte les habits de la marque du rappeur… »
L’avenir du rap
Pour Ludovic Walpole, les artistes ont tout intérêt à « ne pas prendre ce format à la légère » parce que c’est en show case qu’ils rencontrent leur vrai public, pas à la télé ou dans des festivals de branchés parisiens. Au Pharaon, Ramsès est plus fataliste et voit les show cases comme un cache-misère : « C’est devenu très très compliqué d’être patron de club en France à cause des réglementations. On s’amuse de moins en moins en France… »
Enfin, plusieurs rappeurs sont exclus du business des show cases faute de tubes commerciaux et dansants dans leurs répertoires.
N’empêche, pour ceux que le voyage jusqu’à Coachella effraye, surveillez les pages Facebook des clubs franciliens : d’ici peu, vous devriez pouvoir aller voir PNL sur scène en RER…