La statue d'un Juan Carlos sodomisé finalement visible du public

CENSURE Une exposition mettant en scène la sculpture d'un Juan Carlos sodomisé avait en un premier temps était annulée. Le directeur du musée est revenu sur sa décision après un débat vif en Espagne...

Alice Coffin avec AFP
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L'oeuvre d'Ines Doujak,
L'oeuvre d'Ines Doujak, — LUIS GENE / AFP

L'exposition La bête et le souverain aura finalement bien lieu au  MACBA, le musée d'Art contemporain de Barcelone. Une sculpture représentant le roi Juan Carlos sodomisé par la militante féministe et responsable syndicaliste bolivienne Domitila Barrios, elle-même pénétrée par un chien, avait décidé le directeur de l'institution, Battomeu Mari, à annuler l'événement. Il est revenu ce week-end sur sa décision. 

«Une image très sensible» pour le directeur du musée

«Les avis venus de nombreux et divers secteurs de la société, depuis le monde de l'art et de la culture jusqu'à la politique et les médias, ainsi que ceux des professionnels internationaux du monde de l'art m'ont fait revenir sur ma première décision de ne pas inaugurer l'exposition», a expliqué samedi le directeur du MACBA Bartomeu Mari, dans une lettre ouverte.

L'oeuvre en papier mâché de l'artiste autrichienne Ines Doujak baptisée Not Dressed for Conquering / Haute Couture 04 Transport avait déjà été présentée au public en décembre lors de la biennale de Sao Paulo. Sa créatrice avait alors expliqué qu'elle «joue avec les relations de pouvoir et les subvertit». Après avoir appris qu'elle figurait parmi les oeuvres des 30 artistes internationaux composant l'exposition organisée en partenariat avec le Wurttembergischer Kunstverein, de la ville allemande de Stuttgart, Bartomeu Mari avait demandé aux commissaires qu'ils retirent «cette image très sensible», selon les médias espagnols.

Une décision polémique qui a suscité un débat animé en Espagne

Les commissaires, Iris Dressler, Hans D. Christ, Paul B. Preciado et Valentín Roma, ont refusé, poussant le directeur à annuler toute l'exposition. Dans déclaration publique retranscrite sur le-beau-vice.blogspot.fr, ils expliquent:«Chaque oeuvre de l'expo met en question, par ses propres moyens, différents usages de la souveraineté. Dans le cas d'Ines Doujak, il s'agit d'abord de la souveraineté blanche et masculine en rapport avec l'exploitation sexuelle et coloniale; dans le cas des artistes du Kazakhstan, Viktor & Yelena Vorobyeva, il s'agit de l'exercice du pouvoir totalitaire; dans le cas de Sergio Zevallos, de l'usage d'une iconographie sacrée et militaire autant que d'une sexualité normative, pour citer quelques uns parmi ces travaux.»

«Je n'ai jamais vu mon geste comme un geste de censure, assure Bartomeu Mari dans sa lettre. Je l'ai perçu comme un désaccord sur la présence d'une oeuvre concrète et les conséquences de ses possibles lectures.» Il a présenté ses «sincères excuses» en offrant sa démission au musée, qui ne s'était toujours pas prononcé sur ce point dimanche.