Le sex-appeal des super-héroïnes made in france
BD Les Américains ne sont plus seuls à créer des super-héroïnes aux formes aussi généreuses que leurs pouvoirs sont dévastateurs. Deux créations françaises s'engouffrent avec audace et générosité dans ce «créneau»...
Longtemps cantonnés à la bande dessinée franco-belge, les auteurs européens sont de plus en plus nombreux à adopter les normes, graphiques notamment, de cultures «éloignées». Des mangas (BD japonaise) et des comics (BD américaine) sont ainsi désormais réalisés par des Français, certains éditeurs - tels Delcourt - ayant même créé des collections dédiées aux comics "made in france", par exemple.
Deux publications récentes montrent que nos auteurs n'ont rien à envier à leurs homologues d'outre-atlantique, et que leurs spécificités insufflent même une certaine fraîcheur dans le monde des super-héro(ïne)s.
Des rondeurs qui mettent les têtes au carré
Écrite par le productif Xavier Dorison (W.E.S.T, Long John Silver, Les sentinelles, Le troisième testament etc), la série Red Skin n'est pas 100% française puisqu'elle est dessinée par l'américain Terry Dodson, qui a officié, entre autres, sur Uncanny X-Men et Wonder Woman (à laquelle ressemble d'ailleurs l'héroïne de Red Skin). Et elle n'est pas non plus, à proprement parler, le récit d'une super-héroïne au sens généralement entendu, car Vera Yelnikov n'est pourvue d'aucun super-pouvoir. En revanche, dame Nature l'a dotée de capacités et d'attributs physiques hors-norme! Agent d'élite au service de l'URSS (l'action se déroule à la fin des années 1970), Vera est secrètement envoyée à Los Angeles pour devenir, Guerre froide oblige, une super-héroïne américaine chargée de véhiculer des valeurs communistes...Rigolo et enlevé, ce premier tome se distingue de la production américaine dans son ton, résolument sexy (ce que la censure ne permettrait pas outre-atlantique) et plus neutre, car écrit par un scénariste né «entre les deux blocs» de la Guerre froide. Seul bémol, son aspect également un tantinet sexiste, car si Vera y est présentée comme une véritable arme de guerre, c'est aussi une bombasse qui use de ses charmes davantage que ne l'exigent certaines situations.
Red skin tome 1 «Welcome to America» de X. Dorison & T. Dodson - éd. Glénat, 14,95€
Un esprit malsain dans un corps sain
Plus «marquée» dans la culture hexagonale, Attoneen -Chloé Devries dans le civil- est pigiste dans un quotidien le jour et super-héroïne, sur les toits et dans les rues de Paris, la nuit. Comment en est-elle arrivée là ? Un (minuscule) vaisseau extraterrestre en déroute s'est «écrasé» dans son corps, tout juste né, en 1946. Depuis, l'alien Aleph vit à l'intérieur de Chloé et lui dispense, tel Jiminy Cricket, des conseils par télépathie. La jeune fille, qui maîtrise désormais les éléments, a évidemment beaucoup de mal à gérer son quotidien dans une famille très «vieille france» et ses activités nocturnes.Foncièrement atypique, Attoneen est l'exemple parfait du mélange réussi des genres: ni tout à fait BD franco-belge, ni complètement comic, ce récit hybride, écrit par Pierre Boisserie (Voyageur, Dantés, La banque etc) et dessiné par Stéphane Brangier, innove avec intelligence et érudition en nous replongeant dans le Paname des années 1960 (on y assiste même à la première partie du jeune Jimi Hendrix lors d'un concert de Johnny à l'Olympia!). Et prouve à lui tout seul qu'une super-héroïne 100% française, voire franchouillarde, menue comme tout, a autant de consistance que ses consoeurs américaines bodybuildées.
Attoneen tome 1 «Alien intérieur» de P. Boisserie & S. Brangier - éd. Delcourt, 14,95€