Rentrée littéraire: On a lu… «Viva» de Patrick Deville

RENTREE LITTERAIRE (4/10) Il est l'un des dix auteurs les plus attendus de la rentrée littéraire 2014: Patrick Deville se lance dans un étonnant parallèle entre Léon Trotsky et Malcolm Lowry, tous deux partis se réfugier au Mexique dans les années 1930…

Florence Floux
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Patrick Deville publie «Viva», aux éditions Seuil.
Patrick Deville publie «Viva», aux éditions Seuil. — MONTAGE 20 MINUTES

Patrick Deville est un homme de destins. Toujours, il retrace la vie de gens qui le fascinent. Après le parcours passionnant du bactériologiste Alexandre Yersin dans Peste et choléra (Prix Femina 2012), l’auteur se penche sur l’immense figure de Trotsky et celle plus modeste (ment connue) de l’écrivain Malcolm Lowry.

>> Par ici, «L’amour et les forêts» d’Eric Reinhardt, par là «Peine Perdue» d’Olivier Adam et par ici «Charlotte», de David Foenkinos. Et bientôt sur 20 Minutes: Emmanuel Carrère, Amélie Nothomb, Frédéric Beigbeder…

La première phrase: «Tout commence et tout finit par le bruit que font ici les piqueurs de rouille.»

En trois mots: Les portraits croisés de deux personnages que tout rapproche et tout sépare à la fois, au Mexique.

Le pitch: Tampico, au Mexique, 1937. Le renégat Léon Trotsky, ancien chef de l’armée rouge devenu ennemi numéro 1 de Staline, est accueilli dans son exil forcé par les plus célèbres peintres du pays: Diego Rivera et Frida Kahlo, tous deux fervents supporters de la cause communiste. A peu près au même moment, Malcolm Lowry et sa femme s’installent du côté de Cuernavaca, où l’apprenti auteur essaie d’écrire une nouvelle qui deviendra son ouvrage le plus connu, dix ans plus tard: Au-dessous du volcan. Patrick Deville revient sur les traces de ces deux «génies» dans un Mexique qu’il connaît bien et qui occupe à l’époque une place à part sur la scène internationale.

On lit… ou pas? Ça dépend (ça dépasse, on sait). Le parallèle plutôt osé (voire tiré par les cheveux) entre deux personnages qui n’ont pour unique point commun que la passion dévorante de leur engagement ainsi que l’enchevêtrement sinueux de leur vie peut dérouter. Les flash-back, les personnages intermédiaires – Nadeau, Weil, Breton, Modotti, Traven, Artaud… On se perd souvent, au milieu de tous ces fantômes. Au point de se dire que le vrai sujet du livre est finalement le Mexique, dont le culte des morts prend ici tout son sens. Reste le style de Deville et ses envolées lyriques sur la passion, la création et la littérature. De quoi vous donner envie d’écrire un roman ou de faire la révolution (et pourquoi pas les deux), puis de recommencer à douter trois pages plus tard lorsque vous ne comprenez plus de qui on parle.

>> Par ici, toute la rentrée littéraire sur 20 Minutes

L’anecdote: Cela fait dix ans que conter ces deux histoires trottait dans la tête de l’auteur. Dix ans qu’il séjourne au Mexique une à deux fois par an, sur les traces de ses héros afin de réaliser ce qu’il décrit comme «un roman d’aventure sans fiction».

L’enjeu: Patrick Deville termine son cycle de récits historiques -démarré avec Pura vida- à travers l’Afrique, l’Asie et l’Amérique centrale, à laquelle il revient avec Viva. La boucle est bouclée, avec peut-être un nouveau prix à la clé, et pourquoi pas le Goncourt, qu’il avait raté de peu en 2012?

Un bon livre pour… Les amoureux d’histoire, de littérature et du Mexique.

Une mauvaise idée pour… Ceux qui veulent décrocher un peu en cette rentrée. Viva exige un lecteur attentif, voire assidu.

Viva, Seuil, 211 pages, 17,50 euros. Sortie le 21 août.