Comment les super-héros ont conquis notre imaginaire
Les super-héros s’offrent à lire, sont plus que jamais présents sur grand écran avec Captain American, le soldat de l’hiver (sortie le 26 mars). Désormais ils s’accrochent aussi aux murs et se donnent à voir. Pas moins de trois expos sont consacrées aux super-héros dans la capitale. «La super Expo! ou le côté obscur des super-héros », à la galerie Sakura (Paris 12e, à partir du 3 avril), «Super-héros: l’art d’Alex Ross» (Paris 16e). Et la plus conséquente et impressionnante: «L’art des superhéros Marvel »au musée Art ludique (Paris 13e). Y ont été réunis pas moins de 300 planches originales des pionniers de la maison d’édition. L’occasion de découvrir comment ces surhumains ont conquis une large part de la culture d’aujourd’hui et donné naissance à des blockbusters.
Académisme dans le dessin
Ces légendes se nomment Steve Ditko, 86 ans, cocréateur de Spiderman, mais Jack Kirby (décédé en 1994) et Stan Lee, 91 ans, les deux inventeurs d’icônes ultra-connues comme les 4 Fantastiques, les Avengers, Thor, Hulk, les X-Men… «Ils ont créé plus de 5.000 personnages, et ont offert un retour de l’académisme dans le dessin, par exemple dans la manière dont ils représentaient les musculatures», note Jean-Jacques Launier, directeur du musée Art Ludique. Des héros figés comme des statues antiques, des protagonistes de nouvelles mythologies. Les super héros sont bien en filiation directe avec les héros grecs et romains, ces demi-dieux.
Dans une vidéo, Stan Lee ne s’étonne pas que ses dessins puissent figurer dans un musée. Mais leur classicisme était contrebalancé par l’imagination. «Avec la Torche humaine, ils ont dû se demander comment dessiner quelqu’un qui prend feu, quelqu’un qui vole ou s’accroche au plafond, remarque Jean-Jacques Launier. Et grâce aux effets spéciaux, le cinéma peut maintenant se montrer à la hauteur de ce qu’ils représentaient autrefois.»Le cinéma les a assimilés avec succès, le jeu vidéo aussi.
Dans les pas de leurs aînés
Il y a les grands anciens et les petits nouveaux. Comme Alex Ross, né en 1970 dans le Portland. Ryan Meinerding, concept artiste dont le travail est présenté à «L’art des superhéros Marvel» explique : «Alex Ross a toujours été une grande source d’inspiration pour moi. Il a été l’un des premiers à essayer de rendre réaliste l’art du comics.»
Ross les adapte en effet à la manière du peintre illustrateur américain Norman Rockwell, qui travaillait surtout pour des couvertures de magazine. «Il l’avait beaucoup étudié à la Chicago Academy for the Arts, appréciait son trait réaliste, note Jesse Kowalski, commissaire de l’exposition et directeur des expos au Musée Andy Warhol, qui a prêté les œuvres. Alex Ross voulait vraiment faire comme si ces héros pouvaient être de notre monde.»
Comment garder leur singularité?
Chez Disney, impossible de toucher aux icônes. Il n’y a qu’une Cendrillon et peu de Mickey. «Nous, on apporte notre propre esthétique aux personnages, en essayant de garder leur singularité. Je crois vraiment qu’il faut coller aux fondamentaux tout en se sentant libre de changer certains aspects», explique Lee Bermajo, dont la vision du Joker a fasciné ses lecteurs. Sa génération est malheureusement encore moins connue que celles de leurs aînés. Sait-on que le Thor imaginé par le Français Olivier Coipel, engagé chez Marvel en 2005, a inspiré son pendant cinématographique?
Désormais tout le monde s’approprie les super-héros. A la galerie Sakura, ce sont des photographes qui les mettent en scène. Son cofondateur Matthieu Taravella explique: «Il s’agit d’une réinterprétation des personnages dans des situations pas héroïques, des situations ou les gens peuvent s’identifier, comme Batman qui prend son café. Ici ces icônes sont victimes du temps qui passe et d’une époque maussade.» N’empêche, même en échappant à leurs auteurs, les super-héros continuent de faire rêver.
Une exposition à Londres
A Londres se tiendra entre le 2 mai et le 19 août, une exposition consacrée aux comics. «Comics Unmasked. Art and Anarchy in the UK» va être accueilli par la vénérable British Library, la bibliothèque nationale du Royaume-Uni. Dans cette expo qui retrace l’histoire du comics dans le pays, seront notamment présentées les œuvres de Neil Gaiman (scénariste des Sandman), d’Alan Moore (Watchmen, V pour Vendetta) et de Grant Morrisson, qui a travaillé sur les dernières aventures de Batman pour DC Comics.