Quand le corps meurtri réapprend la vie
On s’attend à ressentir un malaise et c’est le bien-être qui prend le dessus. Le nouveau centre de médecine physique et de réadaptation de la Tour de Gassies, inauguré ce matin, balaye les clichés qui alimentent l’imaginaire bordelais depuis des décennies. Connue pour accueillir des personnes lourdement handicapées, la Tour de Gassies a longtemps inspiré la terreur. Rasé et reconstruit, les bâtiments se révèlent modernes et accueillants. Le regard s’en échappe par les baies vitrées, vers le parc ou les patios, où les patients discutent en petits groupes. Les fauteuils roulants glissent sans bruit dans les larges couloirs. Depuis octobre 2003, 240 patients et 300 salariés se sont appropriés ce centre flambant neuf. Des ergonomes de l’université de Bordeaux-I ont participé à sa conception, afin d’en faire un modèle d’accessibilité. Jusqu’au parcours Vita, dans le parc, adapté aux fauteuils roulants. Les patients ont même à leur disposition un service appareillage qui façonne leurs prothèses par ordinateur et les fabrique sur place. Le centre accueille « toutes sortes de pathologies et pas seulement les grands accidentés de la route », souligne Catherine Rossignol, directrice adjointe. Traumatisés crâniens, paraplégiques et tétraplégiques, grands brûlés et amputés réapprennent à vivre ici. Leur séjour dure de six mois à un an, « alors autant que ça ressemble le moins possible à un hôpital ». Dans le gymnase, les stagiaires de l’école du dos font leurs exercices, à côté du mur d’escalade, du couloir de tir et de la salle de musculation. A Gassies, tous les sports peuvent être pratiqués malgré un handicap. Un détour par le bassin de balnéothérapie achève la démonstration. Dans l’eau, les patients retrouvent un bien-être et une mobilité qu’ils croyaient perdus. Souffrant des articulations, Marie-Thérèse est fière de pouvoir à nouveau fléchir ses genoux. « Quand on arrive ici, on n’a pas le moral, confie-t-elle. Mais on blague beaucoup et on ressort en forme. » Texte : Marion Guillot Photos : Nicolas Tucat