Bordeaux : Une expo pour montrer ces projets architecturaux qui n’ont pas vu le jour
RENDEZ-VOUS MANQUES L’Atelier d’Architecture King Kong présente une étonnante exposition sur 28 projets architecturaux lauréats de concours, et qui ne se sont pourtant pas réalisés
- L'Atelier d'Architecture King Kong présente dans ses nouveaux locaux à Bordeaux, une exposition sur les rendez-vous manqués de l'architecture.
- Après avoir contacté une trentaine d'architectes, de la région Nouvelle-Aquitaine mais pas seulement, l'atelier a sélectionné 28 projets lauréats, et qui ne se sont pourtant pas faits.
- Les raisons qui ont fait capoter ces projets sont multiples, même si elles sont souvent budgétaires ou politiques.
Il aurait pu se passer quelque chose, mais la rencontre ne s’est pas faite et l’histoire qui avait commencé s’est arrêtée d’un coup… L’atelier d'architecture bordelais King Kong présente, dans sa galerie installée dans ses nouveaux locaux du Wilson, une exposition intitulée « Les Rendez-vous manqués de l’architecture », sur ces projets qui ne se sont finalement pas réalisés.
« L’idée est venue d’une boutade, en discutant avec d’autres architectes bordelais, raconte Paul Marion, l’un des associés de l’agence. On parlait de ces rendez-vous manqués, car nous avons tous dans nos tiroirs des projets sélectionnés comme potentiellement réalisables, et qui pour mille raisons ne se sont pas faits. »
Parc d’attractions, musée et yourte bien-être…
De la boutade est né le désir de faire ressortir ces idées remisées dans des placards. Et après avoir contacté une trentaine d’architectes, de la région mais pas seulement, King Kong a sélectionné 28 projets, de toutes tailles, essentiellement publics mais parfois privés. On trouve ainsi un projet de parc d’attractions dédié à la musique, avec des bâtiments en forme d’instruments, qui devait prendre vie sur un domaine privé, en Corrèze. Un autre sur la réhabilitation de la friche du Gabut à La Rochelle avec un centre consacré aux arts du cirque, ou encore un projet de musée-parc archéologique en Isère.
L’agence bordelaise Moonwalk présente, elle, un projet de yourte dans laquelle étaient prévues des activités de bien-être pour les étudiants, sur le campus universitaire de Bordeaux.
Un projet de centre culturel, dessiné par les architectes Dominique Coulon et Christian Bardin, devait quant à lui voir le jour derrière le cinéma Gaumont de Talence, et ne s’est finalement pas fait…
Le tout premier projet d’Arena à Bordeaux
Beaucoup de projets dans le cadre d’appels à manifestation d’intérêt (AMI) pour le Grand Paris, ou pour le concours Réinventer Paris, ont aussi trouvé leur place dans cette exposition, comme ce « camping vertical » qui devait voir le jour près du canal de l’Ourcq dans le 19e.
Autre catégorie : ces projets qui se sont finalement réalisés, mais à l’occasion d’un autre concours. Une agence avait ainsi remporté le premier concours pour la réhabilitation des silos Lesieur aux Bassins à Flot à Bordeaux, avec un projet d’espaces d’exposition, avant que le site n’accueille finalement un hôtel. « On voit aussi le tout premier projet retenu pour l’Arena de Bordeaux Métropole, qui comprenait un centre commercial adossé à la salle de spectacle, avant qu’un autre concours ne soit relancé, et que le bâtiment se fasse finalement par Rudy Ricciotti » explique Pauline Marchandou, responsable de la communication de l’Atelier King Kong.
« Interroger sur ce qui reste comme un gâchis »
« Le prérequis pour cette exposition, est qu’il ne réunit que des projets lauréats de concours, pas des projets écartés, insiste Paul Marion. L’idée est de montrer que l’on était à deux doigts de profiter de quelque chose, d’un équipement, d’une structure, et que cela s’est arrêté d’un coup. On ne cherche pas à polémiquer, on n’est pas revanchards, mais on veut interroger sur ce qui reste comme un gâchis, que ce soit pour l’architecte mais aussi pour la collectivité, qui engage de l’argent pour ces concours. »
Ces projets ont été arrêtés à différentes étapes, pour des raisons multiples, souvent budgétaires ou politiques, par exemple lors de changements de majorité à la tête de collectivités. « Chez nous, on a eu plusieurs cas de figure, se remémore Paul Marion. On a eu un projet de salle de spectacles à La Rochelle, où nous sommes allés jusqu’à choisir les entreprises, et au final il y a eu un problème de permis de construire sur le terrain. Cela ne s’est pas arrêté là puisque la collectivité a trouvé un autre terrain, nous avons à nouveau gagné le concours, et le projet s’est arrêté une deuxième fois, cette fois-ci pour des problèmes de financement. » Le projet s’est finalement réalisé des années plus tard, avec un autre architecte, et sur un autre terrain.
« Un travail rarement inutile »
Mais l’expérience la plus « traumatisante » chez King Kong, reste celle d’un projet culturel à Avranches (Manche) qui a capoté pour des raisons politiques. « Il portait sur la rénovation d’un bâtiment existant, et une extension, l’idée étant de se servir du toit de la médiathèque pour offrir un belvédère sur la baie du mont Saint-Michel, avec un bâtiment qui émerge à peine du terrain » raconte Paul Marion.
L’exposition propose aussi une réflexion, philosophique et parfois poétique. « L’architecture qui n’a pas été construite, est-elle encore de l’architecture ? » demande Paul Marion en déambulant parmi tous ces projets avortés. « Moi je dis oui, d’autant plus que ce travail est rarement inutile, et qu’il est souvent réinjecté dans un autre projet sous une forme différente. La matière est rarement totalement perdue. »
Exposition ouverte au public à la Galerie de l’Atelier King Kong, 353 Bd Wilson à Bordeaux. kingkong.fr