Bordeaux : De nouvelles règles pour l’attribution des places en crèche dès mars 2022

PETITE ENFANCE La mairie de Bordeaux veut intégrer les revenus des parents dans les critères d’attribution des 2.679 places pour les tout-petits, qu’elle gère via son guichet unique

Elsa Provenzano
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Dans une crèche à Bordeaux.
Dans une crèche à Bordeaux. — S. ORTOLA / 20 MINUTES
  • La majorité écologiste va changer les règles d’attribution des places de crèche à Bordeaux.
  • Le critère des revenus, auparavant absent pour trier les dossiers, va notamment être mis en vigueur pour favoriser l’accès des familles les plus modestes.
  • Le système de points a été revu pour ne pas léser la classe moyenne basse qui aurait des difficultés à faire garder son enfant avec un moyen de garde individuel.

« On propose une réforme de justice sociale pour rééquilibrer l’accès aux places en crèche », résume Fannie Le Boulanger, adjointe à la petite enfance à la mairie de Bordeaux. Une délibération modifiant les critères d’attribution des 2.679 places de crèches gérées par la ville via son guichet unique (crèches municipales, crèches associatives subventionnées ou crèches en délégation de service public) est présentée ce mardi en conseil municipal. 

Ce nouveau système, qui prend en compte pour la première fois les revenus des familles, doit s’appliquer dès les prochaines commissions de mars 2022.

La fin du système « premiers inscrits, premiers servis »

« Les critères n’étaient pas assez précis et plus de 50 % des familles se retrouvaient avec le même nombre de points », explique l’adjointe à la petite enfance. Pour trancher entre les dossiers, les premières demandes étaient privilégiées. Pour en finir avec ce système qui écarte une partie des familles les plus modestes, la majorité écologiste s’est penchée sur ce qui se faisait dans les villes de même taille, réalisant des études comparatives. Or, le critère des revenus fait consensus parmi les cités sondées.

En fonction du quotient familial, ce nouveau système propose 17 tranches pour qu’il y ait le moins d’effet de seuil possible. « Dans l’idée, plus vous êtes favorisés, moins vous avez de points et plus vous êtes une famille modeste, plus vous avez de points. Mais cette courbe n’est pas linéaire, on l’a réfléchie pour ne pas déséquilibrer le système et éjecter les classes moyennes », commente l’élue. Le système a été pensé pour prévenir « un effet ciseau » préjudiciable à la classe moyenne basse, qui n’a ni accès aux minima sociaux, ni aux moyens de gardes individuels plus coûteux.

Les demandeurs d’emploi aidés

Le critère d’activité était au centre de l’ancien système, et les parents qui n’avaient pas d’activité professionnelle avaient peu de chance de décrocher une place en crèche. Non seulement leur statut leur octroyait moins de points mais, si leur dossier aboutissait, ils ne pouvaient prétendre qu’à trois jours de garde par semaine, au maximum. La ville veut leur ouvrir davantage les portes de la crèche.

La mairie met en avant des « études concordantes qui viennent nous prouver que l’accès à un mode d’accueil collectif à un effet correcteur des inégalités sociales », pointe Fannie Le Boulanger. Les stimulations liées à la collectivité, le bain de langage qu’elle offre et l’accompagnement de la famille par des professionnels de la petite enfance ont des effets très positifs sur le développement de l’enfant. A noter aussi que le taux d’effort fourni par familles modestes est plus important si elles doivent se tourner vers l’accueil individuel, en raison des mécanismes de cofinancement.

La loi impose aux gestionnaires de consacrer 5 % de leurs places aux familles qui touchent le RSA ou qui sont en parcours d’insertion. La ville veut aller plus loin, après une concertation avec les crèches privées : 15 % des places de chaque crèche seront consacrées à ce public.

Préserver le maillage alors que la ville croît

Aujourd’hui, la ville satisfait 40 % des demandes, ce qui est déjà plutôt bien par rapport à d’autres villes françaises de même taille et un enfant de moins de trois ans sur deux y est gardé par une assistante maternelle. Tout ne repose pas sur le système de « tri » des dossiers : reste après à faire correspondre les demandes avec le nombre de places disponibles dans les crèches, qui ont des règles différentes et des pressions démographiques variables, en fonction de leur quartier d’implantation.

Huit nouvelles crèches vont ouvrir sur le mandat mais elles seront localisées dans les nouveaux quartiers pour faire face à la croissance de la population. « L’objectif est d’y maintenir le taux de couverture », appuie l’adjointe à la petite enfance. Pour la ville, le coût net annuel moyen d’une place en crèche (indépendamment des participations des familles et de la CAF) s’élève à 7.300 euros. Un budget conséquent qui doit servir un système plus juste aux yeux de la majorité qui espère rendre ce moyen de garde davantage accessible aux familles modestes, monoparentales, aux demandeurs d’emploi et aux classes moyennes.

Au bout d’un an, des corrections pourront être apportées au système, en fonction des retours du terrain. Il faudra néanmoins plusieurs années pour en voir changée la sociologie des crèches bordelaises.