Bordeaux Métropole: Comment concilier le risque inondation et l'injonction à construire?

URBANISME La métropole de Bordeaux vient d’investir 20 millions d’euros pour restaurer une partie des digues sur la Garonne alors que l’agglomération attire de nouveaux habitants…

Elsa Provenzano
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La Métropole a déboursé 20 millions d'euros pour conforter les digues sur la rive droite de la Garonne.
La Métropole a déboursé 20 millions d'euros pour conforter les digues sur la rive droite de la Garonne. — Bordeaux Métropole
  • Des digues viennent d’être consolidées sur la rive droite de l’agglomération bordelaise et doivent permettre de mettre à l’abri des inondations environ 9.000 habitants.
  • C’est aussi une mesure nécessaire pour permettre que de nouvelles constructions sortent de terre.
  • Certaines communes très exposées réfléchissent à des modèles d’habitations flottantes, sur le modèle de ce qui existe au Pays-Bas.
  • Des travaux sur d’autres digues vont être réalisés dans les années à venir.

Ce ne sont pas moins de 26.000 habitants et 14.000 salariés qui sont exposés au risque inondation sur la rive droite de l’agglomération bordelaise. Certains d’entre eux sont soulagés de voir les travaux de renforcement des digues officiellement terminés, ce jeudi, sur un linéaire de dix kilomètres à Floirac, Bouliac et Bordeaux. Ce projet de 20 millions d’euros permet de mettre à l’abri des inondations fluvio-maritimes environ 9.000 habitants, selon la Métropole.

La digue a été dimensionnée avec la tempête 1999 comme élément de référence et intègre une élévation de 20 centimètres des océans (comme l’envisage le dernier rapport du groupe intergouvernemental d’experts sur le climat GIEC).

72 millions d’euros au total

Un chantier indispensable, a fortiori dans un contexte de développement des constructions, notamment avec l’opération d’intérêt national Euratlantique (730 hectares sur les communes de Bordeaux, Floirac, Bègles). Le programme prévoit la construction de 2,5 millions de m2 (logements, bureaux et équipements publics) pour environ 40.000 habitants.

Ce premier chantier n’est qu’une première étape. « Pour contenir le risque inondation, on a mis au point un programme d’action et de prévention des inondations (PAPI) de 2015 à 2021, pointe Kévin Subrenat, conseiller métropolitain délégué aux risques technologiques et naturels et maire d’Ambès. 72 millions d’euros vont être investis sur tout l’estuaire dont 50 millions sur la métropole (20 millions ont déjà été investis sur les digues). »

Au total 36 kilomètres de digues vont être confortés (et sur certaines parties minoritaires construites) sur l’ensemble de l’agglomération.

Des maisons flottantes

Les maires concernés par les travaux aimeraient que ces aménagements leur permettent de valider davantage de permis de construire sur leurs communes. « On voit qu’il faut être vigilant au regard des récents drames dans l’Aude, a nuancé Alain Juppé, président de la Métropole. On pointe le laxisme des élus quand il y a des constructions en zones inondables. » Et pourtant, de nouveaux habitants ont besoin de se loger sur le territoire. « Il nous faut concilier ces exigences contradictoires », résume-t-il.

A Ambès, commune installée sur une presqu’île très exposée au risque inondation, le maire Kévin Subrenat ne peut délivrer aucun permis de construire. Il espère que fin 2019 les travaux sur les digues pourront y commencer. « Soit on décide que ces villes (de la presqu’île) sont des villes musées, soit on s’intéresse à comment faire pour y vivre en toute sécurité. On n’est pas plus bêtes que nos voisins qui savent faire des maisons flottantes », lance-t-il, en prenant l’exemple de Rotterdam.

Des locaux pour mettre à l’abri les habitants

A Saint-Vincent-de-Paul, commune voisine d’Ambès, un local sur le toit de l’école élémentaire, inauguré en janvier prochain, permettra de mettre 150 personnes à l’abri en cas d’inondations. Et Ambès voudrait aménager un gymnase dans le même objectif. « Les habitants voient cela d’un bon œil car aujourd’hui il n’y a pas de solution, pointe le maire d’Ambès. Et sur la presqu’île, on ne peut s’échapper nulle part ».

« Il est important de construire en priorité là où les sols sont déjà artificialisés et de sanctuariser certaines zones avec des enjeux prioritaires, estime Clément Puech, maire EELV de Bègles. Aujourd’hui il y a un équilibre dans l’agglomération avec 49 % de zones aménagées et 51 % de zones naturelles ou agricoles ».

Ces digues (indispensables) ne dispensent pas de la protection des zones humides, rappelle l’élu EELV, qui jouent un rôle d’éponge notamment en cas de fortes pluies, qui peuvent se conjuguer avec de forts coefficients de marées.