Bordeaux: Taxer les poubelles en fonction de leurs poids permet-il de les faire fondre?
DECHETS L’association Amorce, qui accompagne les collectivités locales dans leur gestion des déchets, estime que la tarification incitative lancée progressivement à Bordeaux est utile mais insuffisante…
La métropole bordelaise équipe les poubelles de 55.000 de ses foyers à l’aide de puces électroniques en vue d’une tarification incitative, qui pourrait commencer à être mise en place à l’horizon 2020. Il s’agit d’un nouveau mode de facturation, mis en rapport avec le volume de déchets constatés par les services de collecte.
Combien de collectivités ont adopté cette mesure ?
« Environ 200 collectivités locales soit 5 millions d’habitants sont aujourd’hui concernés par la tarification incitative en France », explique Nicolas Garnier, délégué général de l’association Amorce. Parmi ces territoires, beaucoup de zones rurales situées principalement en Bretagne et à l’est, secteur sur lequel Besançon fait figure de modèle en ayant accompagné sa mesure d’un compostage de proximité.
Le ministère de l’Environnement explique que dans les pays où la mesure est la plus répandue, au Japon, en Suisse et en Corée, les ménages jettent en moyenne entre un quart et un tiers de déchets non triés en moins par rapport aux ménages qui paient une tarification au forfait.
La tarification incitative réduit-elle le volume des déchets ?
« Il y a une baisse forte des déchets dans les bacs mais pour autant il y a un transfert vers les déchetteries et les autres filières de recyclage, pointe Nicolas Garnier. Si le tri est amélioré, les tonnages ne baissent pas. » Certaines collectivités ont commencé à adopter la mesure dès 1999. « Et, on n’a pas encore réussi à démontrer que cela modifiait les habitudes d’achat, de produits suremballés par exemple », ajoute-t-il.
Quels défauts et quels atouts ?
Autre réserve sur le sujet, la pertinence est moindre sur les logements collectifs qui disposent de bacs de collecte communs. « La baisse des coûts n’est pas immédiate ni même systématique », prévient aussi Nicolas Garnier, dont l’association informe les collectivités qu’elles ne doivent pas communiquer en ce sens.
Autre souci, en réaction à cette mesure des gestes d’incivisme comme du dépôt sauvage d’ordures, des déchets brûlés, etc. sont observés. « Il faut que les collectivités se donnent les moyens de les sanctionner », estime le délégué général de l’association. La principale vertu de la tarification incitative c’est de créer une prise de conscience chez les habitants car ils commencent à regarder ce que leur coûtent leurs déchets.
Comment vraiment réduire les déchets à la source ?
Pour l’association, il faut reprendre le sujet à la source, en partant du constat qu’il y a énormément de produits pour lesquels il n’existe pas de filières de recyclage (les jouets, beaucoup d’équipements scolaires, les outils de bricolage, les équipements des arts de la table, etc.) « Les fabricants qui conçoivent des produits recyclables doivent prévoir un financement pour les filières de recyclage mais pas ceux qui produisent des objets non recyclables », s’étrangle Nicolas Garnier.
Autre problème, l’opacité qui règne sur les produits qui se recyclent ou non. Il a ainsi mis au pointun logo triman pour mieux signaler au consommateur les produits destinés à des filières de tri. Sans un travail sur l’écoconception des produits, la tarification incitative relève, à son sens, de l’hypocrisie.