«Nous ramassons plus de dix dauphins par jour sur la Côte Atlantique»
ENVIRONNEMENT Trente-six dauphins ont été retrouvés échoués sur les plages de Gironde ces derniers jours. Willy Dabin, ingénieur d'études en charge de l'animation du réseau national échouage, revient pour 20Minutes sur ce phénomène...
Trente-six dauphins retrouvés morts en Gironde en quelques jours, est-ce inquiétant?
Cette collecte a été réalisée sur le territoire du Centre d’essai des Landes, dans le sud Gironde. C’est une zone militaire sur laquelle nous ne sommes pas autorisés à aller sans accompagnement. Cela faisait plusieurs jours que nos correspondants n’avaient pu y accéder, et lorsqu’ils ont pu s’y rendre, ils ont trouvé trente-six carcasses, échouées depuis plusieurs jours.
Le phénomène des échouages de mammifères s’accélère-t-il ces dernières années?
Oui. Sur la période courant du 11 au 20 février, nous avons recueilli 124 individus sur les côtes Aquitaine, contre 34 sur la même période en 2012. C’est plus de dix par jour. Mais il ne faut pas en tirer de conclusions trop hâtives, car cela ne signifie pas forcément une hausse de la mortalité en mer. Les conditions météorologiques depuis deux ans sont particulièrement propices aux échouages sur la côte Atlantique, en raison de la présence de forts vents d’ouest durant l’hiver. Il n’empêche que nous avons eu une activité intense en 2012, et que cela repart fort depuis le début de l’année 2013.
Qu’est-ce qui explique ces échouages?
Les animaux sont victimes d’un certain type de pêche. Il y a deux phénomènes particulièrement marquants : les filets dormants utilisés dans le Nord de l’Aquitaine, et la pêcherie industrielle, qui utilise une flotille assez importante de chaluts pélagiques en face de l’Aquitaine. Les dauphins sont ainsi victimes soit des filets dans lesquels ils se retrouvent piégés, soit des treuils des chaluts contre lesquels ils se heurtent. Nous retrouvons pas mal d’animaux avec des marques assez visibles sur le corps.
Quels sont les espèces de dauphins concernés?
Il y en a deux en particulier, le dauphin commun, et le marsouin commun.
Ce phénomène est-il spécifique à la côte Atlantique?
Non, mais cette façade connaît ce qu’on appelle un «fort retour à la côte» de carcasses de mammifères en raison des vents d’ouest, et en raison de la présence en nombre de ces dauphins qui ont une épaisseur de graisse leur permettant de vivre dans un environnement froid. Cette graisse joue un rôle d'outil de flottaison. Dans d’autres mers, les animaux morts ont davantage tendance à rester en mer.
Etes-vous en relation avec les pêcheurs pour tenter de remédier à ce phénomène?
Bien sûr. Il faut bien comprendre que les pêcheurs ne souhaitent en aucun cas capturer ces animaux, cela leur est même préjudiciable, car ces bêtes de plus de 100 kilos peuvent endommager leur matériel. Généralement nous leur conseillons de bouger de quelques miles nautiques, car ces populations de dauphins naviguent dans des zones très précises, et très restreintes. Il faut que nous fassions changer les choses assez rapidement, car nous avons une responsabilité vis-à-vis des dégâts environnementaux causés par l’homme.