« Star Academy » : 20 ans plus tard, « 20 Minutes » partage ses plus grands souvenirs

« OUI, LA MUSIIIQUE » Enfants, adolescents ou jeunes adultes à l'époque, les journalistes du service « Culture » de « 20 Minutes » se remémorent leur plus grand souvenir de la « Star Academy »

Le service « Culture » de « 20 Minutes »
La première promo de la « Star Academy » se retrouve 20 ans après
La première promo de la « Star Academy » se retrouve 20 ans après — ROMUALD MEIGNEUX
  • Ce samedi, TF1 célèbre l’anniversaire de son premier télécrochet et diffuse Star Academy : On s’était dit rendez-vous dans 20 ans.
  • Prestations marquantes, candidats et candidates inoubliables, moments de télé hors du temps… L’émission a offert au petit écran d’incroyables séquences.
  • La promo « Culture » de 20 Minutes ouvre sa boîte à souvenirs.

Samedi 20 octobre 2001, 20h53. Au moment où Star Academy débarque sur le petit écran, des millions de Françaises et de Français s’interrogent : que se cache-t-il derrière ce programme qui promet « amour, haine, amitié, rivalité, joie et peine » ? Drôle d’énumération pour un télécrochet dont le but est de faire émerger un ou une artiste au terme de 84 jours de compétition. Au fil des semaines, mais aussi des années, l’émission de TF1 finit par trouver sa place et devient un véritable phénomène de société.

À l’époque, les journalistes actuels de 20 Minutes démarrent leur vie d’adulte ou sont en pleine période critique de l’adolescence (voire de l’enfance). Ce sont donc avec des yeux de téléspectateurs et téléspectatrices lambda que nous découvrons la victoire de Jenifer, l’abandon de Pierre ou les prestations de Grégory Lemarchal. 20 ans après, le service Culture replonge dans ses souvenirs pour évoquer ses moments les plus marquants de sa Star Ac.

La « Star Ac » selon Clément : le moment où tout s’éteint

Star Academy, c’est toute mon enfance. Lorsque l’émission arrive sur TF1, je n’ai que 5 ans, pas beaucoup de dents, et donc très peu de souvenirs de la première saison. Ce dont je me souviens, en revanche, c’est de cet événement qui m’avait traumatisé deux ans plus tard. Le huitième prime commence normalement, je pensais pouvoir regarder Elodie Frégé chanter, les yeux remplis d’amour comme chaque semaine, jusqu’à ce qu’un groupe de personnes habillées en noir déploie une banderole sur laquelle il est inscrit « éteignez vos télés ». Lorsque je vois ça, je me tourne alors vers mes parents, paniqué, et leur demande d’appuyer sur le bouton de la télécommande pour obéir aux ordres des gens derrière l’écran. À l’époque, je ne comprends pas qui sont les intermittents du spectacle. Je ne sais pas non plus qu’ils ne me veulent pas personnellement du mal même s’il me semble en avoir cauchemardé cette même nuit… La semaine suivante, le sentiment d’effroi me reprend lorsque j’ouvre le Télé Star posé sur la table du salon et que la photo du plateau s’affiche sur une pleine page. Effrayé mais pas traumatisé, l’interruption de ce prime en direct ne m’empêchera pas d’assister au concert de la troisième promo de la Star Ac, le tout premier de ma vie. De quoi me forger une excellente culture musicale pour le reste de ma vie.

La « Star Ac » selon Laure : le moment où « je veux et j’exige »

Soyons honnêtes, je n’ai pas beaucoup de souvenirs de la Star Ac. Ce n’est pas parce que j’étais jeune, car j’avais 17 ans bien tapés, mais parce que je préférais Loft Story et A la recherche de la nouvelle star, hautement plus intellectuels comme émission (pas du tout). Le seul souvenir qu’il me reste de ce château d’apprentis casseroles, outre la love story entre Jenifer et Jean-Pascal, ce sont les cours d’articulations d’Armande Altaï, la prof de chant mythique des trois premières saisons. Pendant plusieurs semaines, je me suis entraînée devant mon petit écran à articuler son « Je veux et j’exige » (avec la prononciation des liaisons qui donnerait : je veux Zé j’exige), beaucoup plus difficile qu’il n’y paraît. Et je dois dire que je n’aurais pas terminée première de la classe. Il m’a fallu un temps infini pour réussir un sans-faute. Je ne suis pas sortie de ces séances de visionnage plus intelligente, mais plus habile en prononciation. Ce n’est pas si mal.

La « Star Ac » selon Benjamin : le moment où il faut jouer une chaise

La Star Ac, ce n’était pas que des jeunes gens en tenues de sport qui chantaient et dansaient mal. C’était aussi des jeunes gens en tenues de sport qui jouaient mal la comédie. Bien avant les coups de gueule scénarisés des Marseillais et des Anges, il y a eu les coups de gueule de Jean-Pascal et les larmes de crocodile d’Emma… Et pour corser le tout, les candidats, formés à devenir des artistes « complets », avaient des cours de théâtre. Par décence, nous ne rappellerons pas le nom du prof de théâtre des premières saisons (Oscar Sisto) mais moi, je m’en souviens. A l’époque (circa 2002-2003), je « fréquentais » le cercle théâtreux du Conservatoire régional de Bordeaux. Et les séances de théâtre de la Star Ac où il fallait mimer une chaise ou jouer les émotions à la chaîne façon Actor’s Studio du pauvre avaient le don de mettre les nerfs en pelote de mes « fréquentations » : « Comment tu peux regarder cette merde ? Les gens vont croire que c’est ça notre boulot ? Que c’est ça, apprendre le jeu et la scène ? Cette émission fait tellement de mal au théâtre ! » Pas de panique, pas mal de monde pensait que l’émission faisait aussi du mal à la musique…

La « Star Ac » selon Fabien : le moment où le placard s’ouvre

Je n’avais pas encore 18 ans quand la Star Ac est arrivée sur TF1. A l’époque, j’avais seulement fait mon coming-out auprès de mes amies. Les personnalités ou personnages ouvertement gays étaient rarissimes à la télévision française. Il était difficile, impossible même, de trouver sur les écrans des modèles auxquels je pouvais m’identifier, des figures à travers lesquelles je me sentais représenté. Dans la saison 1 du télécrochet, les apprentis chanteurs étaient tous hétéros par défaut – si, parmi eux, certains appartenaient à la communauté LGBT, cet aspect-là était tu. L’homophobie ordinaire, elle, n’était pas invisibilisée. Je me souviens ainsi de Jean-Pascal piquant sa crise, hurlant dans la cour du château que « la danse, c’est pour les PD » et insistant « Je ne suis pas un PD du cul, moi ! » – la séquence, montrée dans une quotidienne, a été rediffusée lors d’un prime, sous les rires du public, en termes de violence symbolique, ça se pose là. Quelques épisodes plus tard, Mario s’inquiétait, micro ouvert, de savoir si sa chemise « ne fai[sait] pas trop PD ». Les saisons suivantes, les candidats gays et candidates lesbiennes ont fini par gagner (un peu) en visibilité. Je me souviens du coming-out d’Anne-Laure en saison 2 sous-entendu par son interprétation de Sans contrefaçon – curieux choix de chanson, quand on y repense. En saison 3, Michal n’était pas encore « out », mais j’avais bien compris que mes points communs avec ce garçon sensible ne se limitaient pas à l’adoration de Mylène Farmer. J’ai un peu moins suivi les saisons suivantes, mais je ne suis pas sûr que les couleurs arc-en-ciel aient bien brillé. Ce coup d’œil dans le rétro montre comment les choses ont bien bougé en vingt ans. Les talents LGBT de télécrochets ne sont plus condamnés à rester dans le placard et évoquent sans problème cette part de leur identité. Le seul qui n’a pas changé, c’est Nikos Aliagas, toujours excellent maître de cérémonie de la variété télévisée.

La « Star Ac » selon Clio : le moment où j'apprends à vivre intensément

J’avais 13 ans et j’étais en 4e B (ou C peut-être). Mon lot de boutons d’acné et de points noirs, un goût vestimentaire approximatif et les cheveux gras. Un ennui notable aussi. Du fond de ma campagne et de mon petit collège paumé entre deux champs, seuls de rares Happy Meal et un spectacle de danse annuel dans la salle des fêtes de mon village décorée de papier crépon, venaient pimenter mon quotidien d’adolescente. Et puis j’ai découvert la Star Ac. Un univers où tout allait plus vite, plus fort, plus loin. Ce monde dans lequel on passait du rire aux larmes en un quart de seconde et sans produits stupéfiants (je crois). Où l’amour véritable naissait le matin pour se consumer le soir avec fracas. Ce château dans lequel on faisait exploser sa colère et sa rage en explosant des portes en contreplaqué. Sans oublier cette fameuse séquence lors de la saison 3 qui m’avait fait me sentir vivante : celle du départ de Pierre après sa reprise de Bohemian Rhapsody en costume d’époque. « Je n’attends pas qu’on me rende ma liberté, je la prends », déclarait-il devant un public hagard et un Nikos éberlué. C’est peut-être ce soir-là que j’ai pris l’une des premières vraies décisions de ma vie : j’irai en 1ère L. « YOLO ».

Le « Star Ac » selon Anne : le moment où j'entends le « machin de l’orange »

Lorsque la Star Ac est lancée en 2001, je suis une thésarde, installée depuis deux ans à Paris, dans un studio de 18m2 sans télévision. Sur ma platine en boucle cette année-là, Kid A de Radiohead, 10 000 Hz Legend de Air ou encore Vespertine de Björk. Je traîne là où il y a du « bon son », au Rex, au Pulp, au Batofar, dans les soirées Scream ou les raves organisées par Heretik ou Spiral Tribe. Mon seul souvenir de la Star Ac se passe un soir de retour dans ma province natale, à l’approche des fêtes de Noël. L’autoradio chante à tue-tête en duo avec ma mère le « machin de l’orange » de la Star Ac. J’apprends qu’il s’agit d’une reprise d’un titre de Gilbert Bécaud, L'Orange sorti en 1964. Voilà comment je suis (presque) passée à côté du télécrochet de TF1.