«Philharmonia»: Beaucoup d'efforts de crédibilité pour peu d'effets?

MUSIQUE Les acteurs de «Philharmonia» ont été formés par des musiciens pour être crédibles, mais leur crédibilité est remise en cause

Claire Barrois
La cheffe d'orchestre Hélène Barizet et la violoniste Selena Rivière, rôles principaux de «Philharmonia».
La cheffe d'orchestre Hélène Barizet et la violoniste Selena Rivière, rôles principaux de «Philharmonia». — Jean Claude LOTHER - MERLIN PRODUCTIONS - FTV
  • Ce mercredi à 21 heures, France 2 diffuse les deux derniers épisodes de sa série événement Philharmonia.
  • La série a été jugée peu réaliste par des musiciens qui ont pris la parole.
  • Pourtant, tout avait été mis en œuvre pour éviter cet écueil.

Un beau pari, une belle réalisation, un succès d’audiences (pour France 2), mais beaucoup de critiques. Outre le jeu d’acteur, parfois jugé médiocre, Philharmonia n’a pas vraiment convaincu les musiciens et les spécialistes de la musique classique. Pourtant, la production avait mis le paquet pour que la série soit crédible.

Marine Gacem, la créatrice de la série, a mis deux ans et demi à écrire le scénario. « J’ai eu un pass de trois mois pour déambuler à Radio France, se réjouit-elle. J’ai assisté aux répétitions de l’Orchestre national de France, aux concerts, je suis allée voir les représentants des musiciens… » De quoi permettre à l’auteure de retranscrire la vie d’une phalange au plus juste. Quant au scénario, elle n’est pas allée chercher bien loin pour une partie de l’intrigue.

« Sarah Nemtanu m’a confirmé la crédibilité du scénario »

« La nomination de Séléna Rivière par Hélène Barizet, c’est exactement l’histoire entre Kurt Masur et Sarah Nemtanu, rappelle l’auteure. La violoniste m’a d’ailleurs confirmé la crédibilité du scénario. » Puis les musiciens de l’Orchestre national d’Ile-de-France (Ondif), qui constituent l’orchestre de fiction, ont fait des retours directs pendant le tournage. Et les prestations des acteurs étaient surveillées.

Ann-Estelle Médouze, la violon supersoliste de l’Ondif, a conseillé Lina El Arabi, l’interprète de Séléna Rivière, pour en faire une violoniste de génie. « Lina a des bases de violon, mais je l’ai coachée en novembre-décembre, nous expliquait-elle en février 2018 sur le tournage à la Philharmonie. Je regarde les prises et je vais la voir pour la corriger afin que son jeu soit le plus vraisemblable possible. Elle joue tout elle-même, il n’y a qu’au moment où elle joue un Caprice de Paganini qu’ils ont filmé mes mains. Mais Tom Novembre, qui part de rien, s’en sort aussi très bien. »

Charlie Bruneau, qui interprète Agathe Robinson, la corniste, a également dû commencer de zéro. « J’ai joué beaucoup de saxophone, jeune, se souvient-elle. Au cor, j’arrive à sortir un son, ça n’est pas très compliqué, mais de là à le maîtriser, c’est une autre histoire ! J’ai tout de même appris tous les doigtés des morceaux, la respiration… J’ai fait trois ou quatre répétitions pour caler mes départs, mais après il a fallu que je joue mon rôle en plus de l’instrument. » Marie-Sophie Ferdane, qui interprète la cheffe, Hélène Barizet, a, elle, « eu peur de l’imposture, que les musiciens ne croient pas en moi. »

« Le pire du pire est ce qu’il y a de plus intéressant »

En réalité, selon les critiques, l’imposture ne vient pas des musiciens. « L’idée n’était pas de faire un documentaire sur l’orchestre, abonde d'ailleurs Marine Gacem. En dramaturgie, le pire du pire est ce qu’il y a de plus intéressant, et on est partis de ce constat pour traiter l'arrivée de la cheffe d'orchestre. » Et peut-être que l’idée de départ, basée sur la gêne entraînée par son arrivée à la tête du Philharmonia, enferme trop la série dans les stéréotypes qu'elle voulait dénoncer.

« On trouvait ça intéressant de faire une série chorale sur la prise de pouvoir, l’arrivée, comment on s’impose à la force de son talent », explique François Hitter. Et, à moins d’un cliffhanger incroyable dans la vraie vie, le conseiller de programme de la série sur France 2 explique que c’est « une minisérie événementielle qui n’aura pas de saison 2. »