« De "Desperate Housewives" à "Why Women Kill", les portraits de femmes sont ce qui me correspondent le mieux»

INTERVIEW Marc Cherry, créateur de « Desperate Housewives », est de retour à la télévision et sur « 20 Minutes »

Propos recueillis par Vincent Jule
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Avec « Why Women Kill », le showrunneur Marc Cherry reprend la recette qui a fait le succès de « Desperate Housewives » : des femmes et des meurtres !
Avec « Why Women Kill », le showrunneur Marc Cherry reprend la recette qui a fait le succès de « Desperate Housewives » : des femmes et des meurtres ! — CBS BROADCASTING INC. ALL RIGHTS RESERVED
  • Marc Cherry, le créateur de «Desperate Housewives», est de retour jeudi soir sur M6 avec une nouvelle série, au titre équivoque : «Why Women Kill»
  • La série suit trois femmes, trois mariages (et trois meurtres ?) à trois époques différentes
  • Le scénariste revient pour « 20 Minutes » sur ces portraits de femmes qui le passionnent depuis plusieurs décennies

Avec Lost, Grey's Anatomy et Dr House, Desperate Housewives fait partie de ses séries de la rentrée 2004 qui ont révolutionné la télévision, et surtout lancé le fameux « phénomène séries » qui se traduit aujourd’hui par la Peak TV. En huit ans d’existence, la création de Marc Cherry n’a pas toujours fait l’unanimité public et critique, mais a su imposer ses femmes au foyer comme des héroïnes à la fois complexes, subversifs et progressistes.


Marc Cherry, lui, n’a pas perdu du temps et a remis le couvert avec Devious Maids, et un succès plus discret mais toujours la même recette : des femmes et des mystères. Ce qui est presque le titre de sa nouvelle série, Why Women Kill, diffusée à partir de jeudi soir sur M6 et consacrée à trois femmes, trois mariages et trois époques différentes (1963, 1984 et 2019). Un concept ludique pour un portrait de femmes multiple, sur lequel Marc Cherry revient pour 20 Minutes.

Vous avez commencé votre carrière sur « Les Craquantes » et ses héroïnes quinquagénaires… Tout vient de là ?

Oh oui ! (rires) The Golden Girls [titre original des Craquantes] a été ma première expérience en tant que scénariste de télévision, et il s’agissait déjà d’une série sur un groupe de femmes. J’ai adoré. Un concours de circonstances et d’opportunités a fait que j’ai retrouvé ce modèle au fil des années et des séries : Les Cinq Dames Buchanan, Desperate Housewives, Devious Maids et maintenant Why Women Kill. J’ai essayé d’écrire autre chose [Macho Man, avec Jason Bateman], mais les portraits de femmes me correspondent le mieux, donc j’y ai consacré toute ma carrière.

« Des femmes et des meurtres » est un peu devenu votre formule magique, non ?

Je dirais plutôt « des femmes qui font des choses qu’elles ne devraient pas ». Mais je ne cherche pas non plus à appliquer une formule ou une recette à chaque série, elles viennent à moi de manières très différentes. Pour Why Women Kill par exemple, j’ai toujours eu cette idée d’une femme qui découvre que son mari la trompe et qui sympathise avec sa maîtresse, avec toutes les conséquences que cela implique. Même les plus sombres. Je voulais en faire un film, que je n’ai jamais écrit.

Puis la société Imagine Television de Ron Howard et Brian Grazer m’a approché pour réfléchir à une nouvelle série. Ils ont rejeté toutes mes propositions, mais j’ai mentionné mon idée de film. Ils ont adoré, mais ils voulaient en faire une série, et je n’avais pas forcément assez de matière pour tenir 10 épisodes. C’est ainsi qu’est née la structure avec différents mariages et différentes époques qui contrastent entre elles et montrent comment les femmes et les mariages ont changé avec le temps… ou pas.

Ce dispositif vous permettait-il de faire le portrait ultime des femmes, de la Femme ?

Cela permet surtout de multiplier les regards. Le mien reste celui d’un homme d’âge moyen et conventionnel, et j’ai d’ailleurs mis beaucoup du mariage de mes parents, de leur absence de communication, dans l’intrigue qui se déroule en 1963. Mais pour le présent, et son couple polyamoureux, j’ai dû faire des recherches pour trouver sa dynamique.

D’expérience, je sais aussi qu’il faut multiplier les voix et les tons, c’est pourquoi j’ai fait appel à de jeunes auteurs pour ce couple à la fois moderne et complexe. Joe Keenan, qui avait travaillé avec moi sur Desperate Housewives et qui est connu pour Frasier, s’est surtout occupé des années 1980, et moi, j’ai écrit l’intrigue et le couple de 1963, car ils correspondaient à ma première idée, à l’histoire que je voulais raconter depuis longtemps.


Et ce titre « Why Women Kill »… Il semble presque légitime en ces temps post-Weinstein et post #MeToo.

Il y a de ça. Mais surtout, les services de streaming sont devenus tellement importants, les séries tellement nombreuses, qu’il fallait un titre accrocheur, qui sorte du lot. Et bien sûr qui rende compte de la vie des femmes d’aujourd’hui, de leur colère. Why Women Kill suggère aussi le côté dark et fun de la série, une caractéristique de mon travail.

Comment s’est passé le casting des trois héroïnes ?

Le processus a été somme toute classique, avec un appel dans le tout Hollywood, des actrices plus ou moins connues. J’avais déjà rencontré Ginnifer Goodwin, je la connais de Once Upon A Time, et lorsque j’ai vu son nom circuler, j’ai tout de suite pensé qu’elle serait parfaite pour le rôle de Beth Ann. Quant à Lucy Liu, je suis un grand fan, mais je pensais plutôt à elle pour Taylor. Finalement, elle a aussi auditionné pour le rôle de Simone. Elle était terrifiée à l’idée de la jouer mais elle s’est lancée. Il nous fallait maintenant trouver notre Taylor, et j’avais remarqué Kirby Howell-Baptiste dans la première saison de Killing Eve. Et voilà !


L’idée a-t-elle toujours été de faire une série anthologique, avec des saisons bouclées ?

Oui, je voulais faire quelque chose de différent de Desperate Housewives, ses huit saisons et quelque 180 épisodes. Entre nous, le plus difficile était de trouver un cliffhanger à la fin de chaque saison, pour que le public revienne la saison suivante. Avec Why Women Kill, j’ai la possibilité de faire une saison complète, bouclée, et d’explorer de nouveaux personnages et situations l’année suivante. Et s’il n’y a pas de nouvelle saison, ce n’est pas grave, et moins frustrant pour moi, la série se tient tout de même. Je l’ai pitché ainsi au network, à la fois ce serait artistiquement plus fun et il n’y avait pas de raison que je m’ennuie. J’avais vraiment besoin de ce changement.

Bossez-vous déjà sur la saison 2 ?

Oui, elle sera très différente, même en termes de structure. Je ne veux pas en dire plus pour l’instant, mais il n’est pas dit que je prenne les trois timelines. Il y sera en revanche toujours question d’une femme a priori ordinaire qui découvre un secret sur son mari. Ah, et de meurtre.