VIDEO. «"Fortnite", "Apex Legends", "Call of Duty"... Les jeux battle royale sont là pour durer», selon Brendan Greene, créateur de «PUBG»

INTERVIEW Si « Fortnite » lui a un peu piqué la vedette, « PlayerUnknown’s Battlegrounds » reste le précurseur des jeux battle royale, et l’un des plus joués, « 20 Minutes » a rencontré son créateur Brendan Greene alias PlayerUnknown

Propos recueillis par Vincent Jule
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«PlayerUnknown's Battlegrounds» a popularisé le mode Battle Royale tel que nous le connaissons aujourd'hui, mais il n'est plus tout seul avec «Fornite», «Apex Legends» et même «Call of Duty»
«PlayerUnknown's Battlegrounds» a popularisé le mode Battle Royale tel que nous le connaissons aujourd'hui, mais il n'est plus tout seul avec «Fornite», «Apex Legends» et même «Call of Duty» — PUBG Corp.

Si Fortnite n’a pas créé l’événement au dernier E3, plutôt tourné vers  le(s) futur(s) du jeu (et donc Cyberpunk 2077), il n’en était pas moins présent, avec l’un des plus gros stands du salon. Le genre battle royale s’est également fait discret, même si les annonces du mode Nuclear Winter de Fallout 76 et de la nouveauté Fall Guys ont confirmé qu’il était là pour durer, et évoluer. L'« autre » jeu de battle royale, Player Unknown’s Battlegrounds (PUBG), s’est contenté d’un coucou à la conférence Xbox et quelques goodies dans les couloirs du Convention Center de Los Angeles.

PUBG est pourtant à l’origine du phénomène, enfin surtout son créateur Brendan Greene plus connu sous le pseudo PlayerUnknown, avant de se faire piquer la vedette par Fortnite. PUBG compte tout de même toujours plus de 400 millions de joueurs, dont 227 millions actifs tous les mois. 20 Minutes a rencontré ce « joueur inconnu » alors qu’il dit au revoir (mais pas adieu) à son bébé, et que la PUBG Europe League bat son plein.

Tous les jeux ou presque ont aujourd’hui leur mode battle royale, mais vous avez créé le tout premier ?

Oui, je pense qu’on peut le dire. Je vivais au Brésil et ne travaillais pas du tout dans l’industrie du jeu. J’étais photographe, web designer, un outsider en quelque sorte. Je jouais occasionnellement à des FPS comme Delta Force : Black Hawk Down ou America’s Army. Puis j’ai essayé le mode DayZ d’ARMA 2, et il m’a ouvert les yeux sur les open worlds. Je suis devenu amoureux et obsédé par cette idée de liberté. Il y a aussi eu la compétition en ligne Survivor GameZ, toujours sur DayZ, et je me suis dit que je pouvais l’améliorer, arranger certains trucs. Inspiré à la fois par les films Hunger Games et Battle Royale, j’ai développé mon propre mode et DayZ : battle royale est né.

Quelle était votre idée première, votre mantra ?

La simplicité. Quels que soient les précédents jeux, les références culturelles, on en revient finalement à la survie, un système de loots, et des zones bleue et rouge. C’est parce que le gameplay est si accessible qu’il amène à des situations folles, imprévisibles, comme on peut le voir sur Twitch. Le mode DayZ : battle royale était presque trop compliqué, il y a du crafting et d’autres choses qui faisaient que le joueur pouvait décrocher. Sur PlayerUnknown’s Battlegrounds, j’ai beaucoup dit non aux propositions que l’on me faisait. Je voulais que le jeu reste le plus simple possible, parce que c’est ce qui marche. Je savais que ça marcherait. Et ça a marché. (rires)

Comment expliquez-vous le succès phénoménal des modes battle royale ?

Nous pouvons parler de succès pour PUBG, mais le phénomène, c’est Fortnite (rires). Pour être honnête, c’est difficile à expliquer, nous y réfléchissons encore aujourd’hui. Personnellement, je pense que c’est la liberté accordée aux joueurs, il n’y a pas de bonnes ou de mauvaises manières de jouer. Nous avons créé un espace où vous combattez d’autres joueurs, et voilà. Il n’y a pas d’autres règles que de survivre. Tout le monde peut comprendre, et j’ajouterai que sur PUBG, le gun play est très efficace.

Vous n’avez pas été frustré ou énervé par la réussite de « Fortnite » ?

Pas du tout. Ce sont des choses qui arrivent. Il ne faut pas oublier que le battle royale est un mode, et pas un jeu. Il est open source et donc à ouvert à tous. Quand je vois le battle royale s’inviter dans tous les jeux, et même à la télévision chez Ellen De Generes, je me sens comme un père fier de ses rejetons (rires). Le genre a d’ailleurs beaucoup évolué ces deux dernières années, avec Fortnite, mais aussi Apex Legends ou les modes blackout de Call of Duty et firestorm de Battlefield. A l’origine, je ne rêvais que d’ajouter un mode à ARMA 2, et maintenant il se retrouve sur des licences incontournables. C’est surréaliste.

Je n’aime pas cette idée de guéguerre entre les battle royale, ce n’est pas Highlander. Le succès de l’un ne se fait pas au détriment des autres. On parle de plus de 400 millions de joueurs de PUBG dans le monde, un chiffre à faire tourner la tête. Tu peux être bon ou aimer un battle royale, et pas un autre. Par exemple, Apex Legends est formidable, mais il va trop vite pour moi, ce n’est pas mon type de shooter.


Le battle royale permet aussi de mélanger les gameplays…

J’attends toujours un mode battle royale pour  For Honor, vous imaginez avec des épées géantes ? (rires) Le battle royale permet beaucoup de choses, il a maintenant sa propre vie. J’ai fait ma part, j’y ai consacré cinq ans de ma vie, ce qui est long sans être interminable. Aujourd’hui, je développe d’autres idées, d’autres jeux, loin du genre. Mais ma porte reste ouverte.

Les enfants adorent les jeux de battle royale, et plus particulièrement « Fortnite ». Qu’en pensez-vous ?

C’est très intéressant, car ils jouent moins au jeu qu’ils ne traînent ensemble. Fortnite offre un lieu virtuel, un réseau social, où ils peuvent être avec leurs amis. Minecraft en a été un aussi, et l’est toujours aujourd’hui. Les nouvelles générations ont grandi avec ces espaces en ligne, et c’est selon moi le futur du jeu vidéo,  à la Ready Player One.

Le genre battle royale peut-il disparaître aussi vite qu’il est apparu ?

On ne peut être sûr de rien, mais je pense que le genre est fait pour durer. Je crois que l’on aura des Call of Duty, Battlefield et d’autres jeux chaque année. Après, il est aussi possible qu’un autre mode débarque et prenne tout le monde, créateurs comme joueurs, par surprise. C’est la beauté du jeu. Ce qui prend du temps en revanche, c’est de s’installer sur la durée, surtout si l’on prend en compte la dimension esport.