Gauvain Sers, de la Creuse à Paris, trace sa route à la rencontre des «Oubliés»

RENCONTRE Le chanteur revient avec un deuxième album intitulé « Les oubliés », et une future tournée

Marie Leroux
Le chanteur Gauvain Sers en concert à Saint-Germain-en-Laye en septembre 2017.
Le chanteur Gauvain Sers en concert à Saint-Germain-en-Laye en septembre 2017. — SADAKA EDMOND/SIPA
  • « 20 Minutes » a invité Gauvain Sers à visiter l’exposition « Peindre dans la vallée de la Creuse ».
  • Le chanteur creusois y est replongé dans son enfance et a raconté le sens de son engagement artistique et social.
  • Artiste populaire et fier de l’être, Gauvain Sers met ses valeurs en actes en réalisant des concerts au profit de différentes causes.

« Oui j’ai quitté la Creuse, parce que je voulais découvrir Paris et surtout parce que c’est l’endroit où il faut être pour la musique… ». Gauvain Sers se laisse gagner par la nostalgie alors qu’il déambule, à l’invitation de 20 Minutes, dans l’ exposition  Peindre dans la vallée de la Creuse. Le chanteur et sa casquette s’arrêtent devant les toiles de peintres que les paysages creusois ont inspirés. Des paysages qu’il connaît bien, même si son succès, et son militantisme, l’ont amené à découvrir d’autres coins de France.

Le chanteur Creusois Gauvain Sers à l'exposition «Peindre dans la vallée de la Creuse».
Le chanteur Creusois Gauvain Sers à l'exposition «Peindre dans la vallée de la Creuse». - M. Leroux/20 Minutes

Alors qu’il vient de sortir son deuxième album, Gauvain Sers revient tout juste d’une tournée un peu spéciale : « J’ai fait 10 dates. Nous sommes allés dans des régions isolées et dans des lieux symboliques pour moi, comme l’école qui a inspiré ma chanson, Les oubliés. J’ai fait deux concerts dans la cour de récré. » La tournée acoustique des Oubliés est aussi passée par des salles des fêtes, des hôpitaux, de Dun Le Palestel à Chanteix en passant par Tilloy Les Mofflaines. Des lieux « oubliés », des lieux et des gens auxquels auquel Gauvain Sers veut dédier son album. « Les gens chantent Les oubliés dans les manifestations contre la fermeture des écoles, je trouve ça génial que ma propre chanson m’échappe. C’est beau ce qu’il se passe avec cette chanson ! »

Un artiste populaire et philanthrope

Au milieu des peintures de paysages ruraux, Gauvain Sers se souvient avoir fait plus de 80 kilomètres pour pouvoir assister à un concert étant plus jeune. C’est aussi le sens de sa tournée des Oubliés, chanter dans des régions isolées pour amener la culture là où elle est difficile d’accès : « c’était très important d’aller au-delà de la chanson et d’être en cohérence avec elle, d’aller à la rencontre des gens plutôt que ce soit eux qui viennent nous voir dans les grandes villes. »

C’est aussi pour cela que le chanteur veille à toujours être compris et entendu par le plus grand nombre. L’interprète de Pourvu refuse l’élitisme social qui peut s’établir dans la musique et accorde une attention particulière à ce que ses chansons parlent à tout le monde car « si une chanson devient populaire, c’est qu’elle est réussie », et c’est selon lui la meilleure chose qui puisse arriver à un artiste.

Le jeune chanteur veut utiliser son art comme moyen de dénonciation et de médiatisation de phénomènes tel que la désertification des campagnes qu’il chante dans Les oubliés, mais pas uniquement : « J’avais envie de parler de tous les gens que je trouve encore oubliés. Les femmes sont encore oubliées dans trop de domaines aujourd’hui, et les réfugiés sont, je crois, les plus grands oubliés du 21ème siècle ». Ces oubliées, il les chante dans des titres aux résonances féministes et humanistes tels que Excuse-moi mon amour, Au pays des lumières ou encore L’ Etudiante.

En plus de dédier une chanson aux migrants, Gauvain Sers s’est engagé à verser à l’association Action Solidarité et réfugiés l’intégralité des recettes perçues grâce aux trois concerts donnés dans la Creuse à la fin du mois de mars 2019. La somme servira à accueillir une nouvelle famille de réfugiés en détresse dans le village de la Creuse. Parce que Gauvain Sers revient encore et toujours à la Creuse.

Le Robin des bois limousin

Devant un tableau d’Eugène Alluaud, il pointe du doigt le village qui l’a vu grandir. Gauvain Sers trouve encore son inspiration dans son cocon creusois. Lui qui partage sa vie entre la Creuse et Paris a besoin des deux pour exister : « Je me sens autant épanoui en Creuse qu’à Paris, je pense que c’est un équilibre et que j’ai besoin des deux ».

Loin de la pollution et de l’individualisme de la capitale (qu’il déplore), le chanteur se ressource le plus souvent possible dans son village natal. Là-bas, ses souvenirs d’enfant lui permettent de nourrir de quelques chansons autobiographiques, pour se livrer un peu à son public. Mais il n’est pas le seul à se livrer. Il reçoit ainsi beaucoup de messages. Surtout depuis qu’il a répondu à l’appel au secours de Jean-Luc Massalon concernant la fermeture de l’ école de Ponthoile… Ces appels à l’aide, il ne peut malheureusement pas tous y répondre : « Il ne faut pas non plus devenir le Robin des Bois, même si je l’adore et que c’est mon personnage préféré, mais je pense qu’il est important d’être sincère dans la démarche et de parler de ce qui me tient vraiment à cœur. »

Amoureux de la chanson Française

Ce qui lui tient le plus à cœur, finalement, c’est aussi et surtout la chanson française dans laquelle il a baigné depuis tout petit et qu’il chantait déjà dans son premier album avec le titre Dans la bagnole de mon père. Inconditionnel de  Renaud (qu’il considère comme « un parrain ») mais aussi de Jacques Brel, Barbara, Francis Cabrel en passant par Allain Leprest, l’auteur-compositeur-interprète a eu la chance de partager un titre, Y a pas de retraite pour les artistes, avec Anne Sylvestre sur ce second album. Gauvain Sers se rappelle encore avec émotion le moment où la chanteuse a accepté, sans hésiter une seconde, la sollicitation du Creusois : « C’était vraiment un moment suspendu en studio avec elle cette après-midi. C’était vraiment très chouette ».

En quittant l’exposition Peindre dans la vallée de la Creuse, Gauvain Sers croise un couple de retraités creusois l’ayant reconnu et qui lui demande « à quand un nouveau concert chez nous dans la Creuse ? » Pas avant 2020. Déception pour les deux fans, qui devront patienter… Ce genre de rencontres avec son public, qui n’aurait peut-être pas été possible s’il ne s’était pas exilé à Paris, c’est le moteur de Gauvain Sers. « C’est important pour moi d’être en cohérence avec mes convictions et mes textes, et d’aller à la rencontre des gens ».