Comment le Festival de Cannes compte se réinventer pour sauver une saison de cinéma
SELECTION OFFICIELLE Privés de course à la Palme d’or, les 56 films de la Sélection officielle bénéficieront d’un label « Cannes 2020 » pour accompagner leur sortie en salles.
Ni palme, ni paillettes, mais un label : Cannes 2020. Privé de Croisette et de montées des marches, le Festival de Cannes a dévoilé ce mercredi 3 juin sa Sélection officielle qui, pour la première fois, ne sera pas accessible qu’aux seuls festivaliers, mais à l’ensemble du public, à mesure que les films vont sortir en salles.
Honorifique, ce label qui distinguera chacun des 56 films sélectionnés l’est assurément. Mais il aura aussi pour fonction de panser les plaies d’une économie du cinéma qui risque de sortir exsangue de la crise du coronavirus. En annonçant la sélection du film de François Ozon, Eté 85, Thierry Frémaux a bien insisté sur sa sortie prévue le 15 juillet, quelques jours à peine après la réouverture des salles. Il faut redonner au public l’envie de revenir au cinéma.
« Cette sélection s’est construite dans la perspective de voir le Festival de Cannes assumer plus que jamais la première de ses missions : promouvoir les films, les artistes et les professionnels en montrant leur travail, être le pont entre les salles et le public », explique le délégué général. Au critère habituel du comité de sélection : « Est-ce un film pour Cannes ? », s’est ajouté celui de : « N’est-ce pas un film parfait pour le retour en salles ? ».
Cinq comédies et quatre films d’animation
Le premier des critères, c'est quand même la présence d’un casting de stars. Et le plus affolant de Cannes 2020 est à mettre au profit du nouveau film de Wes Anderson, The French Dispatch, tourné en France à Angoulême, avec Bill Murray, Tilda Swinton, Timothée Chalamet, Owen Wilson, Frances McDormand, Adrien Brody, Benicio Del Toro, Mathieu Amalric, Léa Seydoux et Willem Dafoe. Un film monté comme un recueil de nouvelles, dont la sortie est prévue le 14 octobre.
Mais le plus remarquable de la sélection vient sans doute d’une grosse poignée de comédies qui détonne, aux côtés de films d’animation. Deux genres trop souvent absents de la Croisette. Thierry Frémaux s’en amuse : « Quand je lui ai annoncé sa sélection, Laurent Tirard [réalisateur connu pour ses Astérix et ses Petit Nicolas] m’a dit qu’il n’aurait jamais imaginé être sélectionné un jour à Cannes. » A noter également un feel good movie avec Kad Merad et un nouveau film de Bruno Podalydès avec son frère Denis. Côté film d’animation, citons Soul, le nouveau Pixar signé Pete Docter, et le premier film du studio Ghibli depuis longtemps, signé du fils d’Hayao, Goro Miyazaki.
Seize films de femmes et quinze premiers films
Si la sélection officielle compte cette année à peu près autant de films que d’habitude (56 contre 59 l’an dernier), on dénombre plus de films français (21 contre 13), plus de films de femmes également (16 contre 14) et plus de premiers films (15 contre 10). « Jamais autant de cinéastes débutants n’avaient figuré dans la seule Sélection officielle, estime Thierry Frémaux. C’est la preuve de la vitalité créatrice du cinéma, c’est aussi l’engagement que prend le Festival sur l’avenir. » Parmi ces « petits nouveaux », deux acteurs connus, Viggo Mortensen et Laurent Lafitte, qui font leurs premiers pas derrière la caméra.
Cinquante-six films sélectionnés en vrac, sans distinction de section, compétition, hors compétition, séance spéciale, Un Certain regard. Cela n’empêche pas de retrouver quelques visages familiers : François Ozon, mais aussi Maïwenn, Thomas Vinterberg, Naomi Kawase, Jonathan Nossiter, Lucas Belvaux, voire Sang-ho Yeon, le réalisateur coréen du film de zombies Dernier train pour Busan, dont Peninsula est la suite. Mais chacun des films, aussi différent soit-il, se retrouve à égalité. « On laissera la critique et l’opinion, quand tous les films auront été vus, se forger le soin de délivrer sa palme idéale. »